Sous nos yeux, peu à peu mais en fait très vite, s’impose la nécessité de juridictions qui tranchent des débats entre avocats, pour régler les conflits de nature territoriale, économique ou autres qui peuvent à tous moments intervenir entre États souverains, exactement comme les individus ou les autres entités collectives, entreprises, syndicats ou autres associations, soumettent banalement leurs différends à des juridictions civiles, pénales, commerciales et même administratives lorsque le différend oppose ces entités particulières à l’État – qui sait comment se défendre.
On apprend aujourd’hui, en cette mi-avril 2025, que la Chine porte plainte contre les États-Unis devant l’OMC, l’Organisation mondiale du commerce, qui comporte nombre de juridictions tout-à-fait qualifiées pour apprécier la violence de l’embargo sous forme de taxes douanières que Donald Trump prétend appliquer particulièrement à la Chine, avec des taux simplement prohibitifs. La tentative serait symbolique, l’OMC étant privé de l’essentiel de ses moyens depuis un moment en raison précisément de l’hostilité des États-Unis, explique-t-on sur France 24.
Ainsi, l’OMC manquerait cruellement de juges, au point qu’on doute qu’elle puisse vraiment instruire la plainte chinoise… L’urgence est d’y remédier. C’est aux nations conscientes de cette nécessité de se liguer pour financer autant qu’il y a besoin, et fournir autant de juristes qu’il faudra, pour qu’une telle instance fonctionne réellement.
Des États aujourd’hui, tels les États-Unis, déclarent se retirer de juridictions internationales, et ne plus être concernés par leurs arrêts. C’est illusoire – de telles juridictions ont, par nature, compétence universelle. Leurs arrêts sont par définition reconnus par l’ensemble des États qui y souscrivent, et il serait très étonnant que la force conjointe de l’ensemble des États soient indifférente à celui qui prétend s’y soustraire. Contre un État récalcitrant rien n’empêcherait une juridiction de prononcer, par exemple, un embargo généralisé… (Trop sévère, une telle mesure ne devrait exister que comme arme de dissuasion, et on peut espérer que les jurisprudences élaborées par de telles juridictions seraient plus subtiles, moins violentes et non moins efficaces.)
On devrait espérer qu’au contraire des pronostics pessimistes émis par des spécialistes, les juridictions de l’OMC soient en état de traiter rapidement la plainte chinoise, rapidement puisqu’il y a urgence. Quelques dizaines d’autres États, affligés de même par des taxes invraisemblables, seraient normalement amenés à soumettre leurs problèmes, ainsi que des entreprises, puisque Trump ose agir de façon discriminatoire, entreprise par entreprise… En procédure d’urgence, des arrêts devraient tomber sans délai pour couper court à l’offensive de Washington, tant celle-ci déroge manifestement aux principes les plus élémentaires du droit.
Mais l’actualité appelle d’urgence le secours du droit international à Gaza, et dans l’ensemble des territoires toujours occupés illégalement par l’armée israélienne, aujourd’hui avec une violence extrême déployée en particulier contre les populations civiles. Pas moins que pour les taxes de Trump, la politique de Bibi Netanyahou risquerait fort d’être sanctionnée lourdement. Là aussi, il est bien probable que des arrêts internationaux, appliqués par les États adhérents aux principes et à la valeur de telles juridictions, ne seraient pas sans effet. Là encore, la gamme des sanctions est infinie, et il faut donner pouvoir aux juridictions d’être aussi inventives que des situations complexes peuvent imposer de l’être.
En Ukraine aussi. La guerre a bien trop duré, et ce n’est certes pas à une pseudo-négociation faite par-dessus de la tête de l’Ukraine qui peut avoir la moindre légitimité, même si elle ne manque pas de force, surtout entre les mains d’autocrates délirants tels Poutine et Trump. C’est au droit international que l’Ukraine et la Russie doivent soumettre leur problème. La Russie, plutôt que d’agresser aurait dû en appeler à des juridictions compétentes pour apprécier la légitimité de ses prétentions d’abord sur la Crimée puis sur le Donbass. Aujourd’hui, c’est surtout à l’Ukraine de porter plainte pour la guerre inouïe à laquelle elle s’est retrouvée contrainte.
L’arbitrage d’un tribunal disposant d’une gamme infinie de moyens se doit de prendre en compte les principes du droit comme les situations dans lesquelles ceux-ci s’insèrent, ainsi que procèdent ordinairement tous les juges du monde, au civil comme au pénal.
Arbitrage international plutôt que violence déchaînée. Interdiction des guerres et démilitarisation générale. C’était le programme de la Société des Nations il y a plus d’un siècle. Et c’est d’actualité plus que jamais.
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