Au fil de la peine

22 novembr e 1994 . Des relent s
de l ac ryn1 ogènes fl ottent encore
devan t les n1urs gris du \ »Grand
quart ier\ » de Fl eu ry .Mérogis où
qu el qu es dizaines de rn atons
pié t inent dans la bou e. face aux
genda rm es. • Depuis ving t ans. on
fa i t tou t pour les détenus. on les
dorlote. oo leur consac re des
créd i ts faram i neux . et rien pour
nous ! • . tac he un surve illan t. Il a
l\’accen t du Sud -Ou es t et parait
t rès Jeune. Il n\’a certainemen t pas con nu la
pr ison des années soixan te-dix. Pou rtant il
résume asse z bien l \’é tat d\’esp rit de ses collègues
qui déploren t à la fois leurs con di tions de vie
maténelles – un peu me i lleu res que celles des
salariés des P.T.T. mais inférieur es à celles des
fli cs avec qui ils revend iquen t la par ité – et
l\’absenc e de considérat ion qui en t ou re leur
mét ier de porte-cl és.
Car si la bonne société a besoin de pri so ns,
elle mép rise presque autan t ses geôlie rs que ceux
qu\’i ls ga rd ent. La priso n, c\’est pour l\’essentiel
des pauvres qui ga rde nt d\’autr es pa uvre s. Il n\’en
au rait souvent pas fallu beaucoup pour que les
rôles soient inve rsés . Mais ceux qui son t du bon
c ô I!. d es ba creau x · o u du mo i ns du c ôté l e plus
ag r éa ble – t ienne nt à leurs minuscules
prérogatives. Le pouvo ir d\’enferm er. de
commander. de bri mer, c\’est tout ce qui leur
reste pou r se valor iser . Chaque foi s qu\’on accorde
quelques dro i ts aux déte nus , si minimes soienti
ls, les maton s vivent ça un peu co mme si on leur
arrachait leur âme.
Depuis des décennies, le lobby des syndicats
de la \’\’ pénitenti ai re\ », essen tielleme nt t enu par
F.O. puis relayé par l\’U.F.A .P., exprime ce
se ntiment profond et. même s\’il s\’en défend,
const i tue l e pri ncipal obstac le au x réform es. Tous
ceux qui ont tenté de fa ire bouger l\’u nive rs
car céral se sont heu rt és à cet Et at dans l \’ Etat et
on t f 1nate ment plié devan t l ui.
Est-ce à dire que la prison n\’a pas changé ?
AJ ec des décal ages et dans des soubresauts
par foi s vio lents, elle s\’est adapté e bo n gré mal
&ré à l\’évolution de la socié té. De même que les
illltituteurs ne t apen t plus à coups de règle sur les doigts des élèves, les matons ont renoncé aux tabassages systématiques et aux tortures physiques qui faisaient encore l\’ordinaire de la vie carcérale à la fin des années soixante. Les directeurs de prisons n’ont plus droit de vie ou de mort sur leurs pensionnaires comme c’était le cas voici trente ans.

(…)

Des hommes enchaînés
(…)
co nci toy ens i gnor ent qu\’ on enc hainai t encore l es
hommes à l a mu rai ll e dans les nnn écs cinquan te.
On fai sait alors port er aux détenu s con damn és
aux fers un panta lon spéc ia l , boutonn é sur les
jan1bes, qu\’ils pouvaien t re t irer sa ns dét ac her
leu rs chaines. Cert ains demeur aie nt ain si
at t achés nuit et jour par les anneaux d\’acier. Il
a fallu que Mich elet, min is tre de De Gaulle et
an cien déporté, vi si te Cla irvaux et s\’indigne de
ce lte pratiqu e pour qu\’i l y soit mis fin. Du moins
en principe . car lorsque j\’e us l\’ occasion de vis iter
la pr iso n de Melun en 1988, le directeur se vanta
d\’ avoi r fait reti rer un anneau fixé dans le mur
d \’ un e cellul e où son prédécesseur fa isa it attacher
des gamins réc alcitrants …
Quant aux tortures, une des plus effroyables et
de s plus ét ranges m\’a été racon tée par un vieux
dé t enu : on faisai t mon t er l\’ea u da ns une ce llul e
surno rnmée la \ »piscine\ », ce q ui ob l igeait la
victime à pomp er sans arrêt sous peine d\’êt re
noyée. Charlie Sauer en a décrit une autre qui
cons istait à faire tourner un détenu jusqu\’à
épuisemen t autour d\’une borne. Ca se passait à
Clai rvaux en 1972, peu avant l\’affaire BuffetBo
nt emps , q ui ent raina la mort d \’ un gardien et
d \’ une infi r miè re pr is en ot age. Cette violence
c a rcé r a le e x plique sa n s dou te le d é sespoi   de ces
deux d é t enus \ »que· Pomp i dôu f i t g uillotin e r pou r
l\’exemple, malgré son aversion pour la peine de
mor t, af i n de satisfaire la soif de vengeance des
surveillants.
Ap rès les mu t ine r ies de 74, la rép ression fut à
la hauteu r de ces sinist res tr ad itions . On assista
à des scènes ignobles : des hommes nus
contra ints de couri r entre des rangé es de matons
et de C. R.S. l es frappant à coups de matraque et
de trousseaux de clés – les clés sont à la fois, de
longue date , un symbole phallique du pouvoi r du
geôlier et une arme redoutable.
On au rai t tort de c roi re que ces pra t iques
cessè rent complètem ent par la suit e : un
su rv ei llant chef du nom de Raymond Benois t ,
tort io nnaire notoire, sévissait encore en 198 3 au
quartier des mineurs de Fleu ry-M érog is. Qu i plu s
es t , ce perso nn age sin istre devait alors de
nom breu ses compli c ités à sa situation de
responsable du synd icat C.G.!\’f., lequel fut par la
suite exc l u par la confédération, ce qui nous
donne une Id- da la confusion des genres, ..

Les Q.H.S., fabriques de fauves

(…)

11\’ éch.111 r,e r avec lui qu e le r11in11nurn de 111 ot s i11d 1spcnsabl cs . De: s r11 édec 1n s f! t des psycholog ue s co n1p ari:rcnt ces co 11
détenua du mlnistllrô do ra Juctlco au tnlt1lot6ro lia Io Santo, pourtnlt tac•titet c tte 1ransit1on nsych1atrrquc. Ce choix n\’e\’>l pas sans 1 1SQue  pour
, 1 $ détenus. Commo tous les rnédec1n!:> le  ul ignc nt, la pri son c::.t par
d tinitlon p.t\\hogèn,e. S1\’ des détenus atteints de troubles cngEndrés pt!r leur
ététenticn se voient \ »mMrcal iSés··, voire tran!>férés dans des é tab!1  <;>me11ts
spécialisés. psychl âtfiques ou .. mrxl es\ ». ils n\’auron t plus guère d \’c:  r><>i r de
S;orttt de oe cycle. Car. sl les droits d\’un prisonnier sont minimes, le
pensionnaire d\’un établissement psychiatrique n\’a plus aucun recours.
· On peut prolo(lg_e, SQn internement au-delà de   peine. lui imposer la
··ca1n1sole cnlmlque n •• •

Une violence clean

Dès aujourd \’hu i, lï$olement carcèral conduit dans cette direction. Car. si les
sinistres Q.H.S. Qnt.été\’offic1ellement supprhnés et si la vio n ce physique
direc te et gratuite, non précédée d\’incidents, a diminué, lè   rtiers
d\’isolement sont toujours là. Les isolés occupent d \’ailleurs: l $itflèmes
cellules qui hébergeaient les Q.H.S. \ » A la Santé, la doublè:.i:fiiity. la griffe,
tout est resté en place •, dit Sylvain. Lè mobi lier n\’est plus ÎXP  u  <>J.
l\’isolé a droit à ses objets personnels et nlême, comme tout te:Q\\.Ont1e, à sa
télé et à:sa radio: s\’iLpeut se les payer. Ce n\’est pas négl igeable $ëlllS doute.
• Mais l\’isorement dure plus longtemps et persor)nè ne s\’en i»Q1.°ttfl . JI 1t: · a \ »\’
• • \ »\ »  \ »\’.C. plus de campagne.comme COf) tre les Q.H.S., car Cètte violence  lea11  &i:·-\’, , :· – .. . . .
beaucoup moins spèctaculaîre. • ·\ » .!\’,.iif\’ –  . • – •
Après sept ans d\’isolement, Georges Cipriani, détenu à la centtate- …… · • •   .-;…..   ==–… . –
d\’Ensisheim, a vu sa sa nté se dégrader considérablement. • En juin 1993, 1/ \’ • ·-..:.:.
subissait un placement d\’office dans /\’hôpital psychlatrique de Villejuif. où 1 …. . ..
il était traité de fo rce avec des neuroleptiques. Depuis ce temps, il n\’a cessé
de souligner que son état de santé nécessite vitalement_d\’autrés condition  \’ . . .
de d C::t c 11t ion e t n o 1.->r nn11nen1 ,,, p o •.-.1uo11r0 :i illlliiM d
médecin de confiance \ »• èct it \ »:\ »>a l cmn\’c oan\’!. u ne le\\\\rc al.lrcs-:. e i.IU
procureur de la République. .  ·· ,. . ,, . ..,.,
Quels que soient ·1es actes commis par un détenu, faut -il t fJPê-l iUft  … , ,
nouvelle fois qμ\’il n\’a été çondamn  qO! ,l .  t b to. e!rlOt\’Ä   ..  . 1t \ »
à petit feu ? l es témoignages sur la destructro1\’ psych ique produite par
l\’isolement abondent … Il parait que les Q.H.S. n\’existent plus, dit l\’expolicier
Dominique Loiseau, isolé en détention préventive pendant quarantequatre
mois. Le seul progrès consiste à éteindre la lumière fa nuit. J\’ai
perdu quatorze kilos en isolement. \ »
Une heure de promenade dans un cour minuscu le couverte d\’un gri llage
ou d1une cloison transparente de verre épais, voire dans un cul-de-bassefosse
entouré de barbelés comme à Osny, voi là l \’unique sortie qùotidiennè
de l\’isolé. \ » S\’il a de la chance, il passera sa promenade en compagnie de
deux ou trois autres détenus, mais l\’administration va choisir des imn1igrés
qui ne parlent pas le français, ou un \ »pointeur\ » (Violèur), pour tlmltffr la
communication •, explique Sylvain.
En dehors des cas d\’isolement volontaire ou d isolemeht dè prévèl\’\\u sut
décision du juge d\’instruction, une circulaîre èfu 12 juillot 199 l précise què
des mesures d\’isolement ne dotvent être prises que • lorsque des rais\’ôns
sérieuses et des éléments objectifs concordants pern1ettent de redouter des
risques d\’incidents graves.de ta· part de détenùs d terminès •.Mais
la décision .d\’isolement ressort du seul chef d\’ tabllsseme\’ht pour unê dur e
de trois mols. Ensuite,, il,  o1t en référer au dirêeteur régional pùis au
ministère de la Justice. En pratique, la décision prise par le directeur lbèal
est presque toujours suivie  par la hiérarchie êt lès tecou  sont
excessivement dlfflclles pour ne pas dire Impossibles …

Apartheid rampant

Au cours des dix dernières ànnées, deux choses ont netlèment changé  n
prison 1 d\’une part, le pourcentage d\’IMml&rês et de détenùs ton,bés our
des délits llés directement à Io législation sur le sôjout des è\\rat,gers  
lêglslallort qui a vu uno Inflation des textes réptèsslfs spett cultÄlto, èlnsl
qu\’une nppllcotlon, aux limites du droit, do plus en plus 3VêUQI , con lsta\ »t
à rendre Illégaux dés étrongers qui ne 11 Äalont t>as bvât,t. O\’autt(l l)fttt, 01\\ o
assisté à une vérltable oxploslon de tous lés délllt\\ Il   dhtCl tntllÄt ou
lndlrèclement à ID drogua.
• Jadis, nous avlôns nos l1t11nlsrds, nos Art1be$ ot quelques lJlôcks, ot
c\’dtolt tout. Aujourd\’l1u1, dnns certnlnos prlsôtl$, Il y o pri>t/t)Uêlnont tin
quartier /JSr et/11tlo. A F\’fêslle9, t>nr OX6t)>/JI , ltJ! f.r,1nc-t1fs \ »l)Uf SUCM \’\\
bll1t1C9, Vônt l) la dlvlslô/J A. Pc>ur /)Utllr titi typD, ôl) Vil l\’t
l) f Cil  tèS
NolrtJ. Lo prdtexte de c&tto sd111 11atlôtt, e\’est dv/d&1nn1@1>t I  tà Pn>th 1ne>nt
cul/uro/, tas prolJ/d111&s d& t1ôurr1toro des 1u11su/111,,11s1 ore. /!n fJft, e \’èst tin
vôrlliJlJ/o oportllolcJ. Cêltl 1uodlfltJ c:ô119fddrôt.>Jo111ô11t I  gttu tlon  Ä t\’inl riôur
d09 /Jtl!ions, 011 ddltulannt ltJs po11lbllltds do aolld rlM. 11
Il ont trôn dlf flollu por ê>tôtUl)lu ùo Qnvulr ôitncto11101\\\\  lll)l   Ä Io
poureontoeo <.Io dôlonun t1011t o QOUI dôlll ont l\'lll\\IHIQtàllOI\\ e la1Äth  ÄltÄt\' eôr oucunu ntntlollquu nu loti teeo11no1 ll fi f 1ou1ont <\\ tlon tubtllllltls tllvo1to  \\ol \" fou!lDülro\" (tau)( Ptlll ltlt!I ), (PAGE 12 : ) (…) De même, les toxicomanes ne sont pas recensés comme tels . Tous n\'ont pas été condamnés pour des délits liés à la vente ou la détention de stupéfiants. En particulier tous ceux pour qui la délinquance a été un moyen de se payer leur dose. Ce qui est certain, c\'est que la proportion de \"toxicos\" a beaucoup augmenté dans les prisons françaises. Parmi les jeunes du Centre des jeunes détenus ou à la maison d\'arrêt des femmes de Fleury, on compte plus de 50 % de condamnations liées à la consommation ou au trafic de drogue. Cette situation entraîne une autre conséquence : la généralisation de l\'usage de tranquilisants Cela ne date certes pas d\'aujourd\'hui qu\"on bourre les détenus de cachets. On les prépare dans une petite fiole , puis on les écrase, de sorte que le détenu ne connaît pas la nature exacte du cocktail qu\'on lui sert. •• En prison. la situation du toxico est terrible, surtout au début de la détention. C\'est le sevrage brutal. Les autres détenus les entendent hurler pendant des nuits entières, frapper à coups de pied les portes de leur cellule. Contre la souffrance engendrée par le manque, les médicaments apparaissent souvent comme le seul remède. Certains se shootent en fabriquant d\'affreux cocktails. mélanges de médicaments et de bière ... « Il y a une banalisation de la prise de médicaments. explique Sylvain. Jadis. si tu voulais être considéré comme un homme. tu mettais un pomt d\'honneur à ne pas prendre ces salopenes. Maintenant. tout le monde en prend. même des types considérés comme des durs ... \" Du C.A.P. à l\'Observatoire des prisons Avec la crise économique. le chômage et le retour de /\'idéologie sécuritaire, la montée de l\'indiv1dual1sme, le repli sur soi, c\'est non seulement l\'intérêt du public pour le sort des détenus qui a baissé. mais les organisations qui menaient le combat sur ce terrain qui ont pratiquement disparu. Le C.A.P. n\'est plus qu\'un lointain souvenir. Rebelles, dernière publication spécialisée et remarquablement bien informée, a cessé de paraître voici un an. La \"Commission prison répression\" et /\'Association des parents et amis de détenus (A.P.A.D.), qui possédait son propre bulletin d\'information. tout comme le plus récent Comité pour l\'abolition de l\'isolement carcéral ont jeté l\'éponge, faute de militants. « Il est très difficile d\'organiser durablement ce milieu \" convient Guy Dardel. ancien militant de /\'A.P.A.D. et animateur de Parloir libre \' , une des dernières émissions consacrées aux prisons, avec celles de Radio libertaire. Cette émission demeure très écoutée par les détenus et reçoit un abondant cou rr ier. \" Les parents de détenus sont très sensibles aux pressions qui s\'exercent sur eux et. souvent, ils tiennent à distinguer ·\'teur prisonnier\" des autres. Je pense que notre action a été tout de même positive. mais nous vivons une autre période, il faut sans doute travailler autrement. \" Plus récente est la création de /\'Observatoire international des prisons, dont la présidente est Christine Serfaty, épouse d\'Abraham Serfaty. libéré de l\'effroyable bagne marocain de Tazmamart après une longue campagne. \" Notre objectif est de constituer autour de chaque prison un groupe d\"observateurs, explique Bernard Bolze, fondateur de /\'association. Nous ne prenons pas positwn sur la nature des peines. leur application et leur durée. Nous n\'intervenons que sur la question du respect des droits et de la dignité des détenus. Nous recueillons des informations et nous les diffusons, notamment à /\'aide de notre bulletin, mais aussi par des conférences de presse, des réunions de toutes sortes. En France. nous disposons aujourd\'hui d\'une vingtaine de groupes locaux. Notre objectif est d\'en mettre sur pied une centaine. \" Le bulletin de décembre 1994 de /\'Observatoire international des prisons dénonce les conditions de détention d\'un prisonnier de Grenoble placé en isolement. Le groupe local de Rouen signale la mort d\'un détenu à la maison d\'arrêt de Bonne-Nouvelle, à la suite d\'une overdose. et souligne que \" la prison n\'est pas un lieu adapté pour les personnes toxicomanes \"· Le numéro précédent évoquait le suicide d\'un auti-e toxicomane, un garçon de vingt-neuf ans, dans la prison Saint-Paul de Lyon. et deux autres suicides survenus à Bonneville et à Ploemeur. Tous deux à la suite d\'internement au mitard, bien que, pour le second, le juge d\'instruction ait signalé dans son dossier \" le caractère suicidaire du détenu \"· De même, le rapport annuel de /\'0.1.P .. s\'il constate que l\'on a pas recensé de cas de torture dans les j)l\'isons françâises. signale toutes so1·tes de mauvil is traitements. et notamment le tabassage c/\'un détenu par des gardiens de la prison Saint-Pau/ de Lyon. Comme q11oi. si elle a recuié, la violence physique n\'a pas disparu des prisons. D 2uta;lt que les information:; co11t il est possible cle disposer ne constiiueni bi,;n souvent que la foce a;Jparente de l \'icebe1·g. Le travcJi/ de f-\'Ob :i r::tl 1at\'.r;o/re )es pr/sc1ns est ,no sit1( ait Guy D;:11·cie! de Psrlo/i libre: rn2is 1 e S1:.int avL:tî tcu/ ·-fes 1i1stFutiorln2/-:-·. sui  t entiC.\’.\’ï \ »11::.·; ..:;n !.\ »r:3
au tres p::.1r !2 ,  r:i; n rnun :. t · r. 5 cur. f.•é -:: r;ne  –

« Bien qu\’on nous reproche d\’être des institutionnels. repond Bernard
Bolze, nous ne sommes pas en odeur de sainteté au m1111stère. Du côté de
/\’administration pénitentiaire, nous nous heurtons à un refus complet de
dialogue. Le courrier que nous adressons aux détenus est censuré, de même
les lettres qu \’ifs nous envoient sont bloquées par les directions
d\’établissement. \ »
L\’Observatoire des prisons reste donc aujourd\’hui la seule structure
organisée qui se préoccupe du monde carcéral. Sa création a bénéficié d\’un
certain impact médiatique et son caractère semi-institutionnel lui a permis
d\’être cité par des journaux tels que Le Monde ou Libération, ce qui n\’était
pas le cas des petites organisations militantes issues souvent de l\’ultragauche
ou du mouvement libertaire et considérées comme marginales. Il est
bien difficile de dire quel pourra être, dans l \’avenir. l\’impact de l\’O.l.P.
L\’emprisonnement d\’un nombre toujours plus grand d\’hommes et de
femmes doit être un motif d\’inquiétude non seulement pour ceux qui
dénoncent la nature de la société dans laquelle nous vivons mais pour tous
ceux que préoccupent les libertés publiques et la démocratie. Comment
demeurer indifférent au sort de cinquante-cinq mille êtres humains 7 Nous
n\’en sommes sans doute pas (encore 7J parvenus au stade des U.S.A. où
plus d\’un million trois cent mille personnes croupissent en prison , mais le
pourcentage de détenus par habitant ne cesse d \’augmenter. En vingt ans, la
population carcérale a grossi de 60 % et les condamnés à des peines de
plus de cinq ans sont deux fois plus nombreux 1 Un émule de Chalandon vat-
il bientôt nous proposer la construction de nouvelles prisons ou la mise en
place de camps de travail pour les jeunes ?
A ses origines, la prison a été conçue pour punir, isoler, contraindre le
détenu au repentir. La notion de punit ion est loin d\’avoir disparu. bien que
ce soit davantage au nom de la protection des citoyens qu\’on prétende
auiourd\’hui incarcérer une population aussi nombreuse. Mais c\’est
beaucoup plus la tranquillité et la sécurité des possedants et des privilégiés
petits et grands qui est en cause que celle de l\’ensemble des habitants du
pays. Quiconque pénètre dans une prison constate que c\’est une fraction de
la jeunesse pauvre qu\’on prive ainsi de liberté. , Ici, nous n\’avons que des
pauvres >, m\’a dit un jour le directeur du C.J.D. de Fleury-Mérogis.
La prison fait partie de /\’arsenal répressif indispensable dont dispose une
société de plus en plus inégalitaire pour imposer l\’ injustice aux couches
sociales les plus démunies et terroriser ceux qu\’elle jette dans la rue et
marginalise. A ce titre, on peut douter qu\’elle disparaisse ou s\’humanise
véritablement dans le monde actuel . Ce n\’est pas pour autant qu\’il faut se
résigner et l\’accepter 1 c
Gérard Delteil


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *