Appel Rwanda

Considérant que la France a été gravement impliquée dans la tragédie rwandaise, étant donné que le gouvernement français :

1- a été le principal appui du régime génocidaire d\’Habyarimana, notamment en ayant fourni durant des années l\’armement et l\’encadrement de ses troupes et de ses milices ;

2- a soutenu ce régime dans sa lutte meurtrière pour conserver le pouvoir, a tenté de le sauver en occupant une partie du Rwanda grâce à \ »l\’opération Turquoise\ » et ses commandos de choc, assuré ladite \ »zone humanitaire sûre\ » le refuge à un grand nombre d\’assassins et aux cadres de ce régime, a accueilli en France des dignitaires de ce régime, a conserver des liens avec des dirigeants de ce régime qui réorganisent leur bandes armées au Zaïre ;

3- a renforcé, par la création de la \ »zone de sécurité\ » le terrible engrenage de l\’exode en particulier vers la \ »zone\ » qu\’il contrôlait ;

4- a toléré la propagande de la radio du régime et de la Radio Mille Collines, dont les appels au massacre des Tutsi, puis à la fuite de la population hors du Rwanda, ont été déterminants dans la genèse et l\’aggravation de la tragédie ;

5- a réhabilité Mobutu en s\’appuyant sur son régime pour mener son opération, affaiblissant gravement par la même occasion son opposition démocratique ;

6- a saboté l\’action du nouveau gouvernement rwandais, d\’abord en lui interdisant l\’accès à la \ »zone humanitaire sûre\ », avant de le dénigrer aujourd\’hui ;

7- a trompé l\’opinion publique sur son propre rôle, notamment par les voix de messieurs Juppé, Balladur et Mitterrand, en présentant comme un modèle de dévouement humanitaire une opération de nature néocoloniale analogue aux opérations militaires récentes des puissances occidentales, en 1991 pour s\’assurer le contrôle du pétrole dans le Golfe, en 1994 pour conserver celui d\’une zone géostratégique francophone au Rwanda, de l\’uranium et du cobalt au Zaïre ;

8- a bafoué la représentation nationale, en ne l\’ayant pas consulté avant l\’envoi des troupes ;

9- a aggravé à chaque étape une tragédie dont il contrôlait les paramètres dès le début, au lieu d\’en inverser le cours, illustration aberrante et ultime de la \ »politique africaine\ » de la France.

Nous saisissons l\’occasion de cet immense désastre, Européens et Africains ensemble, pour demander solennellement :

1- La comparution du gouvernement français devant le tribunal international que l\’O.N.U. a institué pour déterminer les responsabilités dans le drame rwandais,

2- L\’abandon de la politique africaine de la France, lourde d\’autres Rwanda, et notamment : le dessaisissement de la France de toute responsabilité dans la solution de cette tragédie ; le retrait immédiat des troupes françaises de cette région et du reste de l\’Afrique ; la fin de toute relation de la France avec les potentats de ce continent ; la mise sous séquestre de leur fortune déposée dans les banques occidentales ; le développement, dans les relations de la France avec l\’Afrique, d\’une politique de défense des droits de l\’homme, qui prennent parti pour les peuples des pays de ce continent contre la plupart de leurs dirigeants.

2 Considérant que la quasi-totalité des grands médias (notamment audiovisuels) ont joué dans ce drame un rôle décisif, à la hauteur de leur considérable pouvoir, nous interpellons solennellement leurs journalistes et leurs rédactions :

1- pour avoir mis leurs compétences et leur indépendance au service du S.I.R.P.A. (Service d\’information et de relations publiques dés armées) et avoir par conséquent diffusé massivement la version \ »officielle\ » des événements ;

2- pour s\’être fait les chantres du \ »militaro-humanisme\ », ce monstrueux faux nez servant à masquer les vraies raisons de cette intervention ;

3- pour avoir refusé la diffusion de débat contradictoire, d\’analyses et d\’information indépendantes sur la tragédie rwandaise, aux heures de grande écoute et pour des durées équivalentes à celles réservées aux thèses du pouvoir, un véto au demeurant permanence infranchissable sur tout sujet considéré comme sensible par le pouvoir ;

4- pour avoir à nouveau été comme lors de la guerre du Golfe les maîtres d\’œuvre d\’une mystification médiatique planétaire et avoir ainsi porté atteinte au fondement même de la démocratie, en privant les citoyennes et les citoyens de nos pays des moyens de pouvoir former leur opinion librement et en connaissance de cause.


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